Meurtres sans préméditation

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Anna Moï

Abstract

This essay expresses my work as a translingual novelist – immigrating from Vietnamese to French. It deals with the impossibility, as a fiction writer reborn in a new language, to recount reality, as the real world is reflected in at least two cultural zones. The use of a pseudonym is the first step to this split reality. A decision that entitles me to a new identity and one that also led to confusion when I encountered a visitor from my past mono-ethnic persona: Marcelino Truong, a French-Vietnamese painter and author of graphic novels. We had first met at the Institute of Political Sciences in Paris prior to a professional meeting twenty-five years later when both our names and careers had drastically changed. I relate to other translingual writers such as Romain Gary, a virtuoso of disguised identities who wrote novels under two different pseudonyms. The second part of the essay is an inspection of Tijana Miletic’s arguments in European literary Immigration into the French Language: Readings of Gary, Kristof, Kundera and Semprun that reflect my own experience: the themes of the double and incest pervade translingual writers’work, as they do mine.

Cet essai exprime ma perspective de romancière translingue qui passe d’une langue à l’autre, à savoir, du vietnamien au français. En tant qu’écrivaine dont la renaissance à l’écriture s’effectue dans une nouvelle langue, je constate l’impossibilité de raconter la réalité du fait que le monde réel est reflété à travers au moins deux zones culturelles. L’emploi d’un pseudonyme dans mon cas constitue le premier pas vers cette réalité divisée. C’est une décision qui m’octroie le droit à une nouvelle identité et qui mène aussi à des confusions, par exemple, lorsque je recroise sur mon chemin un visiteur de mon passé monoethnique, Marcelino Truong, un peintre et auteur graphique franco-vietnamien. Vingt-cinq ans avant cette rencontre professionnelle, nous nous sommes croisés à Sciences-Po à Paris. Nos noms et carrières ont radicalement changé depuis. Je m’associe à des écrivains translingues tels que Roman Gary, un virtuose d’identités déguisées qui publie ses romans sous deux pseudonymes différents. Dans la deuxième partie de mon essai j’examine les arguments de Tijana Miletic dans son livre European literary Immigration into the French Language : readings of Gary, Kristof, Kundera and Semprun. Ce qu’elle y décrit reflète ma propre expérience : les thèmes du double et de l’inceste imprègnent l’œuvre de ces écrivains, comme ils imprègnent la mienne.

Article Details

Section
Rencontres: Transdiasporic Encounters in Viet Kieu Literature Special Issue 2018 (Peer-reviewed)
Author Biography

Anna Moï

Anna Moï, appointed Chevalier des Arts et des Lettres in 2006, is a well-established French writer whose acclaimed literary works span nearly two decades. Her first two collections of short stories set in contemporary Vietnam, L’Écho des rizières (2002) et Parfum de pagode (2003), were well received by French critics. One of the most respected voices of the Vietnamese diaspora, whose key novels were published by Gallimard, Moï provides an intimate portrait of Vietnam and its people through historical moments, weaving the stories of individuals with the History of their country. Riz noir (2004), which won the prize for the best French-language debut novel at the Festival du premier roman in Cuneo, Italy, recounts the story of two young female students and revolutionary fighters imprisoned in Poulo Condor; Rapaces (2005), set against the backdrop of the Indochinese War and the famine in Tonkin, tells the secret love story between a sculptor and his model; Le Venin du papillon (2017), Anna Moï’s most recent novel to date, for which she received the prestigious Littérature-Monde prize, retraces the heroine’s journey from child to adult in the midst of postcolonial political and military turbulences. Moï is also the author of a collection of essays on language and identity, Espéranto, desespéranto (Gallimard, 2006), which reflects on her use of French as a tool of expression. She was one of the 44 signatories of the manifesto Pour une literature monde en français (2007) a movement which put forward the concept of World Literature in French to challenge the ‘Francocentric’ view of literature. Anna Moï, Chevalier des Arts et des Lettres, est une écrivaine française de renom dont l’oeuvre littéraire s’étend sur près de deux décennies. Saluée par la presse française dès la parution chez l’Aube de ses recueils de nouvelles L’Écho des rizières (2002) et Parfum de pagode (2003) qui ont pour cadre le Vietnam contemporain, Moï s’est distinguée par la suite comme l’une des voix les plus reconnues de la diaspora vietnamienne. Publiés chez la prestigieuse maison d’édition Gallimard, ses romans donnent à voir le Vietnam et son peuple à travers des moments historiques et font émerger le lien entre la petite histoire et la grande Histoire : Riz noir (2004), Prix du meilleur premier roman français au Festival du premier roman à Cuneo, raconte l’histoire de deux jeunes lycéennes et combattantes révolutionnaires incarcérées à Poulo Condor dans les années soixante; Rapaces (2005) dévoile un secret d’amour sur le fond de la guerre indochinoise et la famine au Tonkin en 1945; Le Venin du papillon (2017), dernier roman à ce jour et lauréat du grand Prix de la Littérature-Monde, retrace le passage à l’âge adulte d’une jeune protagoniste prise dans les turbulences politiques et militaires postcoloniales de son pays. Moï est l’un des 44 signataires du manifeste Pour une littérature monde en français (2007), un mouvement contestataire de la perspective franco-centrique en littérature, et l’auteure d’un recueil d’essais sur la langue et l’identité Espéranto, desespéranto (Gallimard, 2006), dans lequel elle réfléchit sur son usage du français comme outil d’expression personnelle.